1999 ou Dieu pris sur le fait

En 1997 mon ami Frédéric s'ennuyait dans son laboratoire. Fred, c'est celui qui avait fait ces simulations numériques sur ordinateur au milieu des années quatre vingt dix, qui illustrent mon ouvrage " On a perdu la Moitié de l'Univers ", paru cette même année chez Albin Michel. Il n'avait jamais écrit de roman, ou de livre en général. Ayant pour idole Barjavel il décida de s'essayer à la Science-Fiction et en deux semaines accoucha de cet ouvrage. Il essaya de le publier et pour ce faire en envoya des copies à une quinzaines d'éditeurs, qui les lui renvoyèrent à chaque fois avec un petit mot très gentil. Découragé, il installa son manuscrit sur un site où 30.000 lecteurs le lurent et l'apprécièrent. Dommage qu'un éditeur n'ait pas accroché car Fred a une imagination intarrissable. Au cas où son livre aurait été pris il avait déjà commencé le suivant, dont la suite resta ... dans l'encrier. Le monde de l'édition est sans doute passé à côté d'un bon auteur de SF. Mais ces choses arrivent fort souvent.
Je peux même citer une anecdote : en 1965 j'avais décidé d'essayer de gagner un peu d'argent en créant des bandes dessinées. J'ai donc composé " Le Voyage du Maxiflon ". J'avais deux rendez-vous, la même semaine, l'un à Paris, au journal " Pilote " et l'autre à Bruxelles, chez les gens de " Spirou ". Le hasard a voulu que celui de Bruxelles tombe avant celui de Paris. Là-bas, pas de problème. Les dessins plurent immédiatement. Delporte me dit :
- Ca va, vous pouvez mettre en couleur et envoyer les planches.
Par curiosité je suis quand même allé au rendez vous donné par Jean-Michel Charlier, aujourd'hui décédé, par ailleurs scnénariste génial ( Les Blueberry, Buck Dany, Tanguy et Laverdure, etc ), qui était alors le rédacteur en chef du journal " Pilote ". Accueil complètement catastrophique :
- C'est très mauvais. Tout, le texte, les dessins. Il faudrait trop de temps pour expliquer tout ce qui ne va pas. Non, je suis désolé...
Si j'avais commencé par " Pilote " j'aurais peut être été tellement écoeuré que je n'aurais pas jugé bon de faire l'aller-retour Bruxelles. La chance a voulu que ça soit l'inverse, sinon Lanturlu n'aurait peut être jamais vu le jour.
C'est là qu'on s'interroge. Pour qu'un éditeur perde de l'argent, il faut qu'il vende moins de 1500 livres. Or le livre de Fred est bon. Tous les gens qui l'ont lu me l'ont dit. Je ne vois pas comment un éditeur pourrait vendre moins de 1500 exemplaires en publiant un ouvrage qui vous captive dès les premières pages. La logique éditoriale est et restera toujours pour moi un mystère.
Mais les temps ont changé. Maintenant tout cela n'a plus guère d'importance. Mon site est visité par pas mal de gens. J'espère qu'ils apprécieront ce livre comme je l'avais aimé moi-même.


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